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Langage

72% des mamans n'ont qu'un seul objectif au retour de la maternité : soulager les maux de leur bébé !

"Moi qui travaillais dans la petite enfance, je pensais que l'accueil de mon propre bébé serait un jeu d'enfant... Et pourtant, dans les semaines qui ont suivi notre retour de la maternité, j'ai été complètement dépassée. Ma fille pleurait quasi sans interruption à compter de 18 heures jusqu'à la fin de la soirée. Mon mari et moi passions des heures à chanter, nous balader, porter la petite en écharpe avant qu'elle ne s'endorme enfin. J'ai fini par avoir un énorme coup de blues vers ses 3/4 semaines, au point où ma sage-femme m'a conseillé de consulter un médecin pour éliminer toute suspicion de dépression post-partum. Finalement, j'ai fini par retrouver le moral et un peu d'énergie vers ses 3 mois, mais je n'aurais jamais pensé pouvoir être aussi affectée par ses pleurs"...

Comme Noémie, nombreux sont les parents confrontés au même constat : même si l'on s'attend à l'épreuve des pleurs, on en sous-estime souvent l'ampleur. Et pour cause :  en variant d'environ 1h40 par jour à la naissance à de près de 3h vers 6 semaines (selon les travaux du pédiatre américain Terry Brazelton), les pleurs ont de quoi décontenancer les jeunes parents les plus endurants. D'autant plus que leur explication physiologique (besoin "d'évacuer" le stress de la journée, coliques du nourrisson, etc.), n'apporte finalement que peu de réconfort face à l'incapacité, temporaire du moins, de les apaiser.

Les pleurs du nourrisson : son premier langage !

Car c'est bien là le nerf de la guerre : si les  parents sont généralement conscients que leur bébé exprime par ses pleurs, un besoin, encore faut-il pouvoir identifier lequel. La solution face à ce désarroi parental ? Selon certains professionnels de la parentalité, elle pourrait se résumer en un acronyme : le DBL ou Dunstan Baby Language.

Le DBL voit le jour grâce à une figure pour le moins atypique dans le domaine de la recherche. Loin des laboratoires universitaires, Priscilla Dunstan, Australienne d'origine, est en effet formée... au chant lyrique ! Dotée de l'oreille absolue (la capacité de reconnaître, à l'écoute d'un son, les notes qui le composent), elle se penche sur la question des pleurs après la naissance de son premier enfant."Face à son bébé aux besoins intenses, Priscilla Dunstan s'est raccrochée à son don pour gérer les crises de pleurs. Chaque jour, elle a compilé les sons et ce qui les calmait pour faire sa propre catégorisation. Puis, elle a confronté ses conclusions au vécu d'un groupe de parents dont elle faisait partie et a eu des retours très positifs," explique Tassiana Laurent, Instructrice en Dunstan Baby Language et animatrice d'ateliers Faber et Mazlish dans la région lyonnaise. La théorie de Priscilla Dunstan : à chaque besoin du nourrisson correspondrait un son, un pleur très particulier.

Comprendre les pleurs en 5 sons fondamentaux 

De la théorie, la jeune maman passe ensuite aux essais cliniques grâce au soutien de son père, professeur en psychologie infantile à l'université. Dans le cadre de ses travaux, elle valide l'existence de 5 sons, correspondant chacun à un besoin, communs à tous les nourrissons, quelle que soit leur origine. Plus précisément, elle identifie qu'apparaîtraient dès la naissance :

  • Un pleur en "Nèh", indicateur de la faim,
  • Un pleur en "Aoh",  symptomatique du sommeil,
  • Un petit cri répétitif en "Èh, Èh, Èh," qui rappellerait le besoin de faire un rot.

Puis vers 6 semaines :

  • Un pleur plus long en " Èèrh" laissant présager des douleurs coliques,
  • Un cri en "Hèh", révélateur d'un inconfort.

Comment expliquer que ces "bribes" de langage soient universels et ne connaissent pas de filtre culturel ? Selon la cantatrice devenue chercheuse, ces 5 sons seraient chacun liés à l'un des réflexes archaïques du nouveau-né. Ainsi, "le son "nèh" de la faim est associé au réflexe de succion. C'est la salivation à l'origine de ce réflexe qui donne au pleur cette sonorité," continue Tassiana Laurent. Identiquement, le "Aoh" du sommeil doit sa résonance unique au réflexe de bâillement...

Un langage de 0 à 5 mois... voire plus !

Et à l'instar des réflexes archaïques qui s'estompent dans les semaines suivant la naissance, le langage universel des bébés serait tout à fait éphémère, à condition qu'il ne tombe pas dans l'oreille d'un sourd ! "Au cours des premières semaines de vie, ces pleurs sont innés, inconscients. En l'absence d'un retour positif des parents, ils finissent par s'atténuer vers 3/4 mois avant de disparaître complètement, le bébé mettant alors en place d'autres stratégies pour communiquer. Mais s'il constate que ces pleurs lui permettent d'obtenir la satisfaction de ses besoins, il peut prolonger et enrichir ce dialogue de manière consciente au fil des mois," continue-t-elle. Ainsi, au-delà de 12 semaines, les nourrissons vocaliseraient aussi des "Guèn" signes de poussées dentaires et de "Lelaol" indiquant aux parents que leur présence est désirée. Des pistes qui restent toutefois encore à valider scientifiquement.

Pleurs, attachement et prévention !

Si on imagine aisément les bienfaits d'une compréhension des pleurs pour les bébés (ils trouvent une réponse à leurs besoins fondamentaux), le Dunstan Baby Language serait en réalité bien plus vertueux. Chez les nouveaux-nés, le DBL permettrait notamment la prévention de certains maux, comme le rappelle Tassiana Laurent: "En apprenant à repérer le rot dès la naissance, les parents peuvent aider à éviter les coliques ou certains problèmes de transit car les gaz s'évacuent par la bouche,' précise-t-elle. Plus important encore, le DBL favoriserait des liens d'attachement secures entre l'enfant et ses parents, avec tous leurs corollaires positifs : "En se familiarisant à cette méthode, les parents parviennent à mettre en place des interactions plus calmes, prennent plus facilement confiance en leur nouveau rôle, le papa trouve plus aisément sa place, le climat familial est plus serein pour les aînés et le stress diminue," conclut l'enseignante.

Jean, jeune papa de deux petites filles de 4 ans et 18 mois, le confirme : "À la naissance d'Elsa, j'ai eu des difficultés à trouver mes marques : j'étais souvent en déplacement, ma femme et ma fille ont fini par trouver leur équilibre à deux. Quand je rentrais, j'essayais de prendre le relais, mais j'étais tellement en peine face aux pleurs de la petite que sa maman finissait par reprendre la main, au point de créer bien des tensions dans notre couple. À la naissance de Léonie, nous avons donc pris les devants en participant à un atelier de DBL. Certes, cela n'a pas été une solution miracle, mais les pleurs sont devenus une occasion pour ma femme et moi d'échanger, plutôt que de nous disputer, et d'ajouter la colère à l'épuisement". Prévenir l'épuisement parental, c'est aussi là l'un des grands atouts du BDL. Et mieux encore: selon ses partisans, la méthode de Priscilla Dunstan préviendrait le syndrome du bébé secoué, en évitant que les parents se retrouvent impuissants, dépassés par les pleurs de leur enfant et sans solution pour y répondre...

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