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Effets indésirables

Pourquoi il faut se méfier des huiles essentielles

Les huiles essentielles, de quoi sont-elles constituées ?

Des huiles végétales...

Une huile essentielle (HE) est un concentré des composés aromatiques d'un végétal, extrait par expression à froid, ou distillation (à la vapeur ou à sec). L'extrait est obtenu à partir de tout ou partie de la plante (feuilles, fleur, écorce par ex.). On trouve plus de 500 huiles essentielles en vente libre. Les civilisations antiques (Egypte, Mésopotamie, Chine, Inde) utilisaient déjà les essences végétales pour leurs propriétés cosmétiques, médicinales et dans les rituels funéraires. Dans les années 1920, un chimiste français, Gattefossé, invente le terme d'aromathérapie et introduit les huiles essentielles dans la thérapeutique.

... à des fins médicinales

Aujourd'hui, leur fragrance est mise à profit dans des parfums d'ambiance, des cosmétiques, des onguents pour massage. Elles sont vendues pures à des fins médicinales pour lutter par exemple contre le rhume (eucalyptus, Vicks Vaporub®), le stress (lavande), la peau sèche... Elles sont alors inhalées, vaporisées par un diffuseur, diluées dans l'eau du bain ou appliquées directement sur la peau.

Les huiles essentielles présentes sous de nombreuses formes et pourtant potentiellement toxiques 

Des huiles qui se trouvent un peu partout

Leur parfum agrémente savons, shampoings, crèmes diverses, mais aussi détergents et lessives, tabac, produits alimentaires (thé, café, laitages, plats cuisinés). Certaines ont des propriétés thérapeutiques : antiseptiques, anti-inflammatoires, anxyolytiques, diurétiques, anti-hypertensives, anti-pyrétiques, notamment.

Se méfier des terpènes et des cétones

La Pharmacopée européenne liste les huiles essentielles ayant des propriétés médicamenteuses. Parmi ces dernières, des huiles essentielles particulièrement toxiques sont réservées au monopole pharmaceutique (Article D.4211-13 du Code de la santé publique). Les composés contenus dans certaines huiles peuvent être mal tolérés ou toxiques. Ce sont les terpènes (ex. térébenthine, genévrier, citron) et les cétones (ex. carvi, sauge, thuya, camphrier).

Précautions d'utilisation chez la femme enceinte et le nourrisson 

  • La femme enceinte : Certaines huiles essentielles riches en cétones peuvent être à l'origine de convulsions, respiratoires, ou des nausées. Cette neurotoxicité pourrait potentiellement constituer un risque de fausse couche. Par ailleurs, les huiles essentielles passent la barrière cutanée. Leur action sur le système endocrinien du fœtus n'est pas documentée. La prudence est donc de mise. C'est pourquoi, la femme enceinte, pendant les 3 premiers mois de grossesse, ne doit utiliser aucune huile essentielle. Ensuite, sans jamais les ingérer et en les diluant, elle pourra en utiliser certaines. Les Huiles riches en cétones sont en revanche toujours contre-indiquées : sauge, menthe, eucalyptus et camphre (attention au Baume du tigre®)
  • Le nourrisson : On bannira l'usage de ces huiles pour les mêmes raisons, pour le nourrisson de moins de trois mois. Il faut savoir que la plupart des HE sont irritantes pour la peau fragile de bébé.

De 3 mois à deux ans 

  • La mère : En cas d'allaitement, la mère doit respecter les mêmes précautions que la femme enceinte à partir du deuxième trimestre de grossesse. En effet, à partir d'une concentration de 3%, on retrouve des traces d'HE dans le lait maternel. Il convient de vérifier que shampoing et soins corporels sont bien dosés à moins de 3% d'huiles essentielles. C'est en principe le cas.
  • Le bébé :  Pour l'enfant lui-même, le seuil en huiles essentielles est limité à 1% dans les produits de soin.

Jusqu'à 3 ans

  • La mère : On n'utilisera pas d’huile essentielle pure, ni par voie orale. C'est la même recommandation pour l'enfant.
  • L'enfant : Les huiles essentielles de sauge, d’hysope, de thuya, d’eucalyptus et de camphre sont à éviter chez l’enfant en raison d'un risque de convulsions.

Au-delà de trois ans

Il est conseillé de ne pas donner d'huile essentielle à un enfant sans avis médical, sous aucune forme que ce soit. Avec le conseil d'un médecin, certaines pourront être utilisées sous des dilutions et des formes bien précises. 

Les risques en cas de prises non recommandées

Les symptômes généraux d'ordre le plus souvent neurologiques

Les risques principaux des huiles essentielles sont d'ordre, bien souvent, neurologiques:

  • des crises convulsives
  • de l'agitation
  • des somnolences
  • des signes d'ébriété
  • des troubles de l'équilibre
  • des hallucinations

Les signes cultanés

  • des rougeurs
  • des sensations de brûlure
  • des allergies notamment causées par les huiles d'angélique, de ciguë, de fenouil, d’orange, de citron ou encore de bergamote. Une huile altérée par l'air ou la lumière peut le devenir (ex huile de mélaleuca).
  • un contact avec l'oeil peut entrainer une lésion (réversible) de la cornée.

Les manifestations respiratoires ou digestives

  • des irritations de la gorge causant une toux.
  • des couleurs abdominales : nausées, vomissements, diarrhées.
  • les huiles essentielles destinées à être inhalées sont déconseillées aux personnes souffrant d'asthme ou d'hyper réactivité bronchique.
  • des intoxications : la sévérité varie selon le type d'HE, sa concentration, l'exposition, la quantité.

Les recommandations

L'Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) a publié en 2008 et 2011 de nouvelles recommandations :

  • ne pas incorporer de camphre dans les cosmétiques.
  • pour les enfants de moins de 3 ans : pas d' eucalyptol ou de menthol dans les cosmétiques.
  • contre-indication des suppositoires contenant des dérivés terpéniques utilisés en traitement d'appoint des affections ORL et des bronchites. Cela concerne les enfants de moins de 30 mois et ceux ayant des antécédents de convulsion fébrile ou d’épilepsie.
  • les huiles essentielles sont déconseillées à toutes personnes présentant des antécédents d'épilepsie.

Plusieurs cas d’effets indésirables graves ont été déclarés chez de jeunes enfants (2 mois à 4 ans) avec des pommades destinées à être appliquées sur le thorax (ou le dos) en massage. Pensez donc à signaler à votre médecin que vous utilisez des huiles essentielles, car il peut y avoir des interactions avec des médicaments qu'il vous a prescrits.

En cas d'accident

Les premiers gestes

Si vous vous apercevez que votre enfant a absorbé de l'huile essentielle, appelez votre centre Antipoisons. On vous demandera :

  • La nature de l'huile essentielle, sa concentration et la quantité
  • La voie d’exposition : ingestion, contact cutané ou oculaire ?
  • Délai entre l’incident et l’appel.
  • L’âge de l'enfant, les antécédents de convulsions ou d’épilepsie,  les symptômes.

Une mise en observation

Une mise en observation à l’hôpital pourra être nécessaire. Il n’existe pas d’antidote spécifique. Pour une exposition légère et des troubles localisés, les premiers gestes sont:

  • En cas d’ingestion, ne faites pas vomir l'enfant. Les vomissements pourraient entrainer une fausse route de retour et provoquer des troubles respiratoires importants. Ne donnez pas de lait non plus. Donnez de l'eau.
  • En cas de contact avec la peau, lavez avec de l’eau et du savon et rincer abondamment.
  • En cas de contact avec les yeux, rincez au plus vite l’œil à l’eau tiède durant 10 minutes.
  • En cas d’inhalation de vapeurs, faites sortir l'enfant à l’air frais.

Si les signes localisés durent, consultez votre médecin traitant.

Sécurité de l'enfant

Les jolis flacons d'huiles sont bien tentants pour les petits. On les trouve sur le bord de la baignoire, la table de nuit, la table basse. Tous endroits très accessibles… Donc, assurez-vous :

  • de les placer hors de portée, ainsi que les diffuseurs
  • n'achetez que des flacons à bouchon sécurisé
  • fermez-les bien après usage
  • ne les déconditionnez pas et conservez l'étiquette.

Vous l'aurez compris, les huiles essentielles, bien que tentantes, et apparemment anodines, sont suceptibles de provoquer effets indésirables et complications. La prudence est donc de mise chez la mère et le petit enfant.

, Docteur en pharmacie
Docteur en pharmacie, Sylvie Roy a exercé en officine. A la suite d'une formation juridique complémentaire, elle a travaillé à la Direction Générale de la Santé, dans la sous-direction...
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