Depuis l'invention de la procréation médicalement assistée, le nombre d'enfants conçus sans rapport sexuel est en constante augmentation. Du premier « bébé éprouvette » en France, en 1982, jusqu'à la recherche sur embryons et ses potentialités eugénistes, Jean-François Bouvet, agrégé de sciences naturelles et docteur d'État ès-Sciences (neurobiologie) ne cesse d'observer et d'analyser les conséquences d'un tel engouement. Dans son nouvel ouvrage, Bébés à la carte (Equateurs), il revient sur les enjeux d'une telle révolution génétique et planétaire.
La théorie du « big-bang dans le procréatif »
L'auteur, dans la totalité du livre, défend l'idée d'un phénomène largement planétaire : le morcellement du processus de procréation. Depuis Louise Brown, le premier « bébé éprouvette » né en 1978 au Royaume-Uni, les techniques de PMA n'ont pas cessé de se pratiquer et de se développer. En 2014, selon le rapport annuel de l'Agence de la biomédecine, près de 25 000 bébés sont nés grâce à la PMA.
En premier lieu, l'invention de la pilule a donné à la sexualité un cadre dissocié de la reproduction.
Depuis les années 1970, nous sommes face à d'autres formes de révolution biologique et sociétale : la congélation des ovocytes, le don de sperme, la Gestation pour autrui (GPA), le don de mitochondries, l'utérus artificiel...
Un livre porteur des valeurs « Bébé 2.0 » ?
Chaque année dans le monde, sont réalisées 1.5 millions de Fécondation in Vitro (FIV) dont un tiers en Europe. Le nombre d’ « enfants éprouvettes » est aujourd'hui de l'ordre de 5 millions. Les couples rencontrent cependant de plus en plus de difficultés à concevoir un enfant. En seulement quelques années, la pratique de la FIV a rencontré sur son chemin d'autres révolutions biotechnologiques, notamment deux avancées majeures en génétique. En 2003, une vingtaine d'institutions de recherche dans le monde parviennent à séquencer le génome humain. De nos jours, les évolutions constantes en termes de techniques, amènent à relativiser les exploits visibles. En 2012, les « ciseaux moléculaires » sont découverts, permettant de modifier le génome humain. Autrement dit, l'accès à l'embryon par la FIV permet de rentrer dans un processus de sélection des individus, mais aussi de modifier leur patrimoine génétique.
Des progrès de procréation pour quelle vision de l'humanité ?
La modification génétique d'un embryon humain engendre de profonds changements humanitaires. Les futures cellules reproductrices seraient, en effet, affectées, modifiant ainsi le génome de l'individu et sa descendance. Les scientifiques, conscients des enjeux, ne sont pas unanimes sur cette problématique. Les chercheurs s'inquiètent notamment de la séquence de l'ADN en des points non spécifiquement visés, qui se manifesteraient après la naissance en raison d'une interférence avec des gènes impliqués dans la genèse de cancers par exemple. Ces manipulations génétiques peuvent donc avoir de lourdes conséquences. Une technique génétique est-elle fiable véritablement ? Répondre positivement serait accorder une confiance aveugle en des méthodes aux enjeux cruciaux. Et finir par oublier que le bébé est une personne.
> Consulter un extrait du livre ci-dessous :
Lire aussi nos articles :
- Bébés sur mesure : enquête sur le futur de la procréation médicalement assistée
- Ce que le droit à la conversation des ovocytes pourrait changer pour les femmes
- Pr. Israël Nisand: «Mobilisons-nous pour imposer une évaluation des maternités»
> En haut, portrait de Jean-François Bouvet lors d'une conférence "Mutants - A quoi ressemblerons-nous demain ?" (capture d'écran vidéo YouTube)