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On ne transige pas

Zéro alcool pendant la grossesse: une obligation pour protéger bébé

Santé et Grossesse (Fotolia)

Le SAF, dans sa forme la plus complète, touche 1,3 naissance pour mille. En France, l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale (ETCAF) concernerait environ 9 naissances pour mille, soit 7000 enfants par an. Ces chiffres, très significatifs, dénoncent les nombreux dangers sur le foetus. Dégâts cérébraux, corporels ou bien psychologiques, les conséquences peuvent être autant anodines que graves. Sylvie Roy, docteur en pharmacie, rappelle l'importance de ne pas consommer d'alcool pendant la grossesse.

Le SAF est concerné par tous les types d'alcools

L'alcoolisation fœtale est la première cause de handicap mental non génétique. Le principe « zéro alcool » pendant la grossesse est justifié par le fait que l'on ignore le seuil minimum en-deçà duquel l'embryon ou le fœtus ne serait pas soumis au risque. Les symptômes peuvent être nombreux : malformations, retard mental dépendent au moment de l'exposition, de la dose d'alcool, du métabolisme et de l'âge de la mère, de la sensibilité du fœtus lui‐même. Il n'y a pas de différence entre alcool fort ou non. Tout alcool est concerné : cidre, bière, vin et spiritueux...

Une mauvaise connaissance des risques encourus

Beaucoup de femmes méconnaissent les risques liés à la consommation d’alcool pendant la grossesse. L'écueil consiste à sous-évaluer sa consommation en se référant à « tout le monde » dans un pays où les boissons alcoolisées sont fortement liées à l'art de vivre. Certaines femmes enceintes minimisent le risque, car leur propre mère a parfois consommé de l'alcool et a eu des enfants « sains ». Pour des enfants adoptés ou placés en foyer : on ne connaît pas les antécédents de la mère biologique. Cela complique le repérage.

S'interroger avant et après la grossesse

Chaque femme en âge de procréer devrait s'interroger sur sa consommation d'alcool. Plus on consomme d'alcool avant, plus on est à risque de consommer durant une grossesse. En 2013, une étude menée par l'Institut de veille sanitaire montrait que 23% des femmes enceintes persistaient à consommer un peu d'alcool. Et ce d'autant plus qu'elle sont aisées, plus âgées et ont déjà des enfants. Dès que le désir de grossesse existe, il faut s'abstenir d'alcool sous toutes ses formes. Et ce dès les premiers jours de la grossesse. Les dommages peuvent se produire, alors même que la mère ignore qu'elle est enceinte.

Témoignages de mamans concernées par le risque sans s'en rendre compte :

  • Sophie, 25 ans, primipare, « J’ai bu plusieurs verres de champagne le jour de mon anniversaire, je me suis aperçue ensuite que j'étais enceinte de trois semaines ».
  • Véronique, 30 ans, 1 enfant, « J'aurai mon second enfant dans 4 mois, j'ai bu quelques apéritifs le soir, 2 à 3 fois par semaine ».
  • Sandra, 35 ans, mère d'un enfant atteint d'ETCAF« Je suis enceinte de 5 mois, je ne bois pas d'alcool, juste 3 ou 4 bières tous les jours ».
    Chacune de ces femmes minimise sa consommation et risque des atteintes fœtales sans en avoir conscience.

Le cheminement de l'alcool vers les organes vitaux du bébé

Comment se passe le cheminement de l'alcool vers les organes du bébé ? L'alcool passe la barrière placentaire à tous les stades de la grossesse. Au premier trimestre, certains organes sont particulièrement à risque :

  • le cœur
  • les membres
  • les yeux
  • les oreilles
  • les organes génitaux
  • le palais
  • les dents
  • les fonctions exécutives du cerveau. Les enfants atteints auront plus de mal à s'organiser, à s’adapter aux changements, à contrôler leurs émotions, à se concentrer. Les lésions cérébrales sont irréversibles.

Une prise en charge précoce pour diminuer les effets chez les bébés intoxiqués

Les lésions ne peuvent guérir, mais une prise en charge précoce (avant 6 ans) peut en limiter certains effets, grâce à la plasticité cérébrale du jeune enfant. C'est pourquoi la parole sur la consommation doit se libérer, afin que le bébé soit suivi de manière optimale, à l'instar des grands prématurés.

Un environnement calme et sain pour bébé

On recommande que les nourrissons diagnostiqués soient très cocoonés affectivement, sécurisés dans une routine et au calme, pour se développer et compenser au mieux leurs déficits.

Sans aide, de nombreux troubles apparaissent

En l'absence de SAF caractérisé, des troubles secondaires (ETCAF) peuvent se révéler tardivement par des troubles des apprentissages, des troubles du comportement au moment de l'adolescence. On parle de sur-handicap quand ces difficultés altèrent la santé mentale, le comportement sexuel, fragilisent face aux addictions, à la délinquance.

Un accompagnement médico-psychosocial adapté aux enfants

Les équipes qui suivent ces enfants sont multidisciplinaires. Pédopsychiatre, psychologue, orthophoniste, psychomotricien, ergothérapeute évaluent les points forts et les points faibles du profil neuropsychologique. Ils définissent des objectifs réalistes, un programme d'intervention personnalisé et un accompagnement parental. Les enfants bénéficiant d'une part d'un environnement affectif stable et d'autre part de stimulations au long cours (stimulations de la motricité fine et globale, du langage, de la mémoire, de l’orientation dans le temps et dans l’espace, appui aux apprentissages) évoluent mieux.

Des centres pour aider mamans et enfants en difficulté

Selon les territoires, trois types de centres dépistent et soignent le handicap :

Reconnaître le handicap de l'enfant

La reconnaissance de handicap, qui conditionne l'aménagement scolaire, le soutien et la protection tout au long de la formation, s'obtient auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH).

Être accompagné personnellement

Le Plan d’Accompagnement Personnalisé (PAP), proposé depuis 2015 s'adresse aux cas plus légers. Il est révisé annuellement. Cette approche permet d'analyser et de comprendre l'enfant individuellement et de lui proposer des solutions adaptées à son problème.

Mais avant de mettre en place une telle prise en charge, il serait tellement plus "simple" que les futures mamans respectent une totale abstinence dès lors même qu'elles projettent un désir d'enfant. Elles peuvent demander de se faire aider pour résister à la tentation de l'alcool. Un effort peut-être important pour elles, mais décisif pour leur futur bébé. 

, Docteur en pharmacie
Docteur en pharmacie, Sylvie Roy a exercé en officine. A la suite d'une formation juridique complémentaire, elle a travaillé à la Direction Générale de la Santé, dans la sous-direction...
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