Vous êtes ici

Interview de Lise Bartoli

Personnalité, estime de soi, émotionnel... et si tout se jouait dès la vie in utero ?

femme et son bébé jouant sur un lit. Ils sont heureux

Dans votre ouvrage, vous affirmez que les expériences in utero du bébé ont une influence sur la personne qu'il deviendra plus tard. Comment l'expliquer ?

Lise Bartoli : Ce que nous vivons d'un point de vue émotionnel et physiologique nous aide à nous construire, quelle que soit l'étape de notre vie : une rencontre amoureuse, une épreuve... Il en va de même pour ce que nous vivons in utero, avec évidemment, un impact plus ou moins fort en fonction des personnes et des événements vécus par notre mère. Ainsi, un décès ou une séparation pendant la grossesse sera forcément plus impactant pour le bébé qu'une grossesse bousculée par de petits tracas professionnels. Cette influence est due au lien émotionnel très fort entre la mère et l'enfant pendant la grossesse. Sans oublier que, même dans le ventre de sa mère, le bébé est déjà une personne à part entière qui vit énormément de choses.

La grossesse est souvent un moment de grand questionnement pour la future maman, voire d'angoisses. Comment éviter de les transmettre à son bébé ?

Lise Bartoli : Il faut d'abord garder à l'esprit que la grossesse est un moment d'introspection tout à fait normal. Même si l'enfant est très désiré, son arrivée chamboule toujours la mère. Les 9 mois de grossesse sont alors essentiels pour comprendre et accepter sa capacité d'enfantement. L'entourage aussi doit accepter son nouveau rôle : la mère devient grand-mère, l'aîné devient grand frère... Dans ce contexte, il n'est pas rare que des choses liées à notre propre naissance ressurgissent, que ce soit des fausses couches préalables ou des histoires familiales entendues depuis toujours ("Ta naissance a été une catastrophe, j'ai souffert le martyr"). Toute la légende familiale a alors un impact sur la mère, la manière dont elle vit sa grossesse et donc sur l'enfant à naître. Pourtant, cette situation ne doit pas être vécue comme une fatalité. D'abord, il ne faut pas hésiter à extérioriser ses angoisses pendant la grossesse. En parler permet souvent de déposer un poids et de continuer à avancer plus légèrement jusqu'à la naissance. Ensuite, il peut être bon d'échanger avec sa famille sur sa propre naissance pour comprendre certains blocages ou certaines difficultés. Enfin, il est important d'avoir l'aide de son bébé. En échangeant, en étant en lien avec lui par la parole ou la visualisation, il constitue une présence très forte et une aide précieuse.

Comment renforcer le lien avec son bébé pendant sa grossesse ?

Lise Bartoli : L'essentiel est de rester en communion avec son bébé. À ce titre, l'Hypnonatal® peut être une pratique intéressante à découvrir. Par des exercices de visualisation, on parle à l'inconscient et se met en lien direct avec le bébé. On peut alors lui envoyer des messages d'amour, s'autoriser à l'entendre, à le ressentir... Mais c'est à chacune de voir ce qui lui convient le mieux. Pour certaine, le lien passe par la voix (la parole, le chant, ndlr.) ou la méditation pour rester à l'écoute de soi, de son bébé et se sortir de la pression du quotidien. Pour d'autres, se balader, écouter de la musique classique, jardiner, permettent chaque jour de prendre quelques minutes pour soi, se faire plaisir et communiquer au bébé ce que l'on aime. Enfin, on peut prendre le temps d'écrire son ressenti dans un cahier, de mettre des mots sur ce qui se passe pendant la grossesse, que cela soit positif ou négatif. Ce cahier est d'autant plus important que plus tard, il permettra d'échanger avec son enfant autour de la grossesse.

Quel rôle joue la naissance dans la construction de l'identité de l'enfant, puis de l'adulte ?

Lise Bartoli : On pense souvent que tout se joue dans les premières années de l'enfant. C'est vrai, mais la naissance et les premières heures de vie ont, elles aussi, un impact significatif. L'accueil de l'enfant, les soins donnés à la mère, les réactions de la famille, tout entre en considération dans la construction de soi de l'enfant. Et cette influence varie évidemment d'un enfant à l'autre, puis d'un adulte à l'autre, car l'expérience de la naissance n'est jamais la même. Pour certains, la naissance est vécue comme très violente sans que l'on comprenne pourquoi. Pour d'autres, un événement aussi anodin qu'une remarque déplacée de la sage-femme (« Elle prend du temps pour sortir, elle sera paresseuse ») a un impact très fort. Dans les deux cas, les enfants mettent en place des schémas inconscients en fonction de leur tempérament de base, qui les accompagnent au quotidien, même à l'âge adulte. Prenez par exemple, un bébé dont la mère aurait connu un grand épisode de dépression pendant la grossesse. Certains enfants en tirent une grande capacité à séduire. Inconsciemment, ils reproduisent plus tard ce mécanisme qui leur a permis de créer du lien avec leur mère, lors d'une rencontre amoureuse par exemple. À expérience similaire, d'autres réagissent de manière radicalement différente en étant d'abord des bébés très discrets, puis des adultes qui ont tendance à se taire ou à se mettre en retrait par peur de l'abandon. Ces comportements sont loin d'être anodins : développés dès la vie utérine, ils témoignent de notre capacité à la résilience.

Si même une remarque déplacée de l'équipe médicale peut avoir un impact sur l'enfant à naître, comment peut-on le préserver (ou du moins essayer) le jour de la naissance ?

Lise Bartoli : L'essentiel est que la maman reste en lien avec son bébé, dans sa bulle. Et pour cela, il ne faut pas hésiter à investir le papa d'une mission. C'est surtout lui qui va pouvoir éviter les allers-retours dans la salle de naissance, parler à l'équipe, mettre une musique relaxante et surtout encourager la maman. C'est son rôle de permettre à sa conjointe d'activer du positif à ce moment-clé, même s'il est normal d'être stressé. Il peut aussi être intéressant de penser, en début de grossesse, à réaliser un suivi "global" par une sage-femme. En apprenant à comprendre sa patiente au fil des consultations, elle saura ce dont elle a besoin pour se sentir en confiance le jour de l'accouchement.

Si l'on peut se préparer pour que le naissance se passe aussi bien que possible, il y a parfois des complications sur lesquelles nous n'avons pas de prise. Comment aider son bébé à surmonter ces moments difficiles  ?

Lise Bartoli : Sortir de "la matrice" n'est jamais facile, qu'on naisse avec des forceps ou non. C'est pourquoi il faut aider le bébé à mieux vivre l'environnement dans lequel il est accueilli. Je conseille généralement de commencer par une séance chez l'ostéopathe, pour la maman et le bébé, afin de se remettre physiquement. Ensuite, il est important pour la maman de surmonter cet accouchement difficile. Ce travail peut se faire par le biais de l'hypnose, mais aussi par d'autres pratiques (ostéopathie intra-pelvienne, haptonomie post-natale, ndlr.). L'objectif est pour elle de déposer ce lourd bagage pour qu'il n'impacte pas trop le bébé. Enfin, il faut naturellement en parler à son enfant quand il grandit. S'il ne faut pas aborder la question d'une naissance difficile tous les jours, il est essentiel de ne pas laisser des non-dits s'installer. Avant qu'il ne soit capable de vraiment comprendre, vers 4-5 ans, on peut aussi lire un conte métaphorique à l'enfant (1) pour permettre à l'inconscient de travailler sur les blocages occasionnés par la naissance. Il existe de nombreuses solutions pour accompagner son enfant. Ce n'est pas parce qu'on a vécu des expériences difficiles qu'on les "portera" tout au long de sa vie.

Journaliste spécialiste du parenting, de la beauté, du bien-être. Auteure de Mon cahier Ma grossesse et moi, Mon cahier Forme et minceur après bébé, 100 conseils essentiels : la grossesse et Petit...
Partagez cet article